Règles parasismiques pour les éléments non structuraux #2 – Partie 2 : Exigences de comportement parasismique
La résistance sismique d’un bâtiment repose principalement sur la conception parasismique de sa structure. Les éléments non structuraux ne doivent cependant pas être oubliés. Ils sont eux aussi l’objet d’une étude sismique spécifique. Cette fiche (deuxième d’une série de 5) précise les exigences de comportement parasismique pour les éléments non structuraux soumis à l’obligation réglementaire d’analyse sismique.
Cette fiche fait suite à la première partie où sont précisés quels sont les éléments non structuraux (ENS) soumis par la réglementation française à l’obligation d’analyse sismique.
Exigences de la réglementation parasismique pour les bâtiments à risque normal
Pour les bâtiments à risque normal, la réglementation parasismique impose comme exigence principale d’assurer la sécurité des personnes. En outre, elle vise aussi à limiter les conséquences économiques par une limitation des dommages. Cette limitation ne signifie pas une absence de dommages et il est admis qu’après un séisme, le bâtiment puisse faire l’objet de réparations avant de pouvoir être de nouveau opérationnel.
Ces deux exigences sont implicitement satisfaites quand le bâtiment est conçu, calculé et construit selon les règles de la norme NF EN 1998-1.
Dans la norme NF EN 1998-1, la limitation des dommages se traduit simplement par une limite de déformation inter-étages de la structure. Aucun critère de limitation de dommage ne concerne directement les ENS.
Pour les bâtiments de catégorie d’importance IV, jugés comme essentiels pour la sécurité civile, la réglementation ajoute l’exigence de continuité de fonctionnement après séisme, ce qui peut avoir des conséquences particulières pour les ENS (voir le dernier chapitre de cette fiche).
Exigences de comportement des ENS
Pour les ENS, la seule exigence concerne la sécurité des personnes. L’ingénieur chargé de l’étude doit s’assurer que l’élément ne chutera pas pendant le séisme réglementaire. La norme NF EN 1998-1 n’impose pas de vérification explicite sur l’endommagement des ENS, celle-ci étant implicitement couverte par la limitation de déplacement inter-étages des bâtiments.
Pour le calculateur, la vérification de la non-chute d’un ENS se traduit par la nécessité de vérifier :
- la résistance de l’équipement lui-même sous les effets d’un séisme ;
- la résistance de ses ancrages pour les mêmes effets.
Pour beaucoup d’éléments non structuraux utilisés dans les bâtiments, les méthodes de justification sismiques peuvent être précisées directement par l’industriel fournissant le système ou par des règles professionnelles pertinentes.
Effets d’un séisme sur un ENS
Lorsqu’un séisme survient, son action produit sur un ENS des effets inertiels, c’est-à-dire que les mouvements du sol et du bâtiment se traduisent par des accélérations et donc des forces agissant sur l’élément. La vérification de l’élément et de ses fixations consiste donc à s’assurer de leur résistance sous l’effet de ces forces sismiques.
Il convient ici de noter que l’accélération sismique subie par un ENS ne peut pas être déduite directement par l’application du spectre de réponse défini par la réglementation car l’élément est ancré dans la structure du bâtiment et non dans le sol. L’élément perçoit donc des accélérations plus importantes que s’il était posé directement sur le sol, principalement pour les deux raisons suivantes (cf. Figure 1) :
- sa position en hauteur dans le bâtiment : plus un plancher (ou une toiture) est élevé, plus les mouvements et donc les accélérations subies par l’élément supporté par ce plancher sont importantes ;
- le couplage dynamique entre le mode propre de l’ENS et celui de l’ossature du bâtiment.
D’une manière générale, il n’est pas possible d’appliquer directement un spectre de sol pour une structure reposant sur une autre structure et non pas directement sur le sol.
D’un point de vue théorique, la détermination des forces sismiques pour un élément à l’intérieur d’un bâtiment à partir du spectre du sol reste un problème délicat, impliquant de nombreux calculs intermédiaires. Pour les ENS, la norme NF EN 1998-1 propose directement une méthode simplifiée, exposée dans la troisième partie de cette fiche, permettant le calcul direct de la force à prendre en compte dans l’analyse sismique.
Outre les effets inertiels, un ENS est aussi soumis à des effets cinématiques quand il est fixé en différents points de la structure et que ces points se déplacent les uns par rapport aux autres pendant un séisme. Pour un bâtiment, cela concerne essentiellement les parois verticales, les façades extérieures ou les cloisons intérieures, qui sont fixées sur deux niveaux différents : le déplacement relatif des deux niveaux pendant le séisme impose une déformation supplémentaire de l’ENS vis-à-vis de la compatibilité des déformations (voir la quatrième partie de cette fiche).
Cas particulier des équipements techniques pour les bâtiments de catégorie d’importance IV
Pour les bâtiments de catégorie d’importance IV, la réglementation française (Article R563-5 du code de l’environnement) requiert la continuité de fonctionnement après séisme. Cette exigence se traduit par la nécessité de mettre en place une étude d’ingénierie permettant de déterminer, en concertation avec le maître d’ouvrage, les équipements techniques requis pour l’opérabilité du bâtiment. A titre d’exemple, on peut mentionner l’armoire électrique alimentant le bloc opératoire d’un hôpital. Dans ce cas, des essais sur table vibrante peuvent être nécessaires pour démontrer le fonctionnement post-sismique de l’équipement.
L’étude sismique d’un bâtiment de catégorie d’importance IV comporte donc :
- l’analyse sismique de tous les éléments non structuraux listés par la réglementation (voir première partie), et
- l’analyse sismique des équipements techniques identifiés comme nécessaires au fonctionnement de l’installation.
Pour ces derniers, la justification de conformité vis-à-vis de la réglementation parasismique se traduit par les vérifications suivantes :
- vérification de la structure de l’équipement et de ses ancrages sous les effets inertiels (même méthode que pour les ENS) ;
- le cas échéant, prise en compte des effets cinématiques (même principe que pour les ENS) ;
- justification du fonctionnement de l’équipement après séisme, ce qui peut nécessiter dans certains cas (par exemple pour une armoire électrique) des essais sur table vibrante.
Pierre-Olivier Martin, directeur projets de recherche, CTICM