Les silos # 5 – Interactions entre structure et matière ensilée
Le présent article est le cinquième dans une série sur les silos en général et plus particulièrement les silos métalliques. Après les trois premiers articles d’introduction générale, de la présentation des éléments principaux et de la géométrie, puis les différents comportements et caractéristiques de la matière ensilée, on regardera les interactions éventuelles entre structure et matière ensilée.
Pour rappel, nous avons publié sur métalétech :
- Les silos #1 – Introduction générale
- Les silos #2 – Les éléments principaux
- Les silos #3 – La géométrie
- Les silos # 4 – 4.1 Comportements de la matière ensilée (1/3)
- Les silos #4 – 4.2 Comportements de la matière ensilée (2/3)
On utilisera de préférence les termes des Eurocodes :
- NF EN 1991-4 :2006 – Actions sur les structures – Silos et réservoirs
- NF EN 1993-4-1 :2007+A1 – Calcul des structures en acier – Silos
Interactions avec la structure du silo
L’interaction la plus importante, qui est bien prise en compte dans le calcul des actions, concerne la rugosité de la paroi. On comprend facilement que le frottement sur la paroi est autant plus important que la paroi est rugueuse. Pour une paroi rugueuse, en comparaison avec une paroi lisse, on obtient :
- La contrainte de frottement pw maximale augmente très peu pour les silos très élancés, mais considérablement pour les élancements de silo faibles (ordre de grandeur : 1,7),
- Le cumul des contraintes pw sur la hauteur, donnant un effort normal vertical nzSk dans la paroi, augmente de manière non négligeable pour les silos très élancés (de l’ordre de 1,15), et considérablement pour les élancements de silo faibles (de l’ordre de 1,8),
- Les contraintes horizontale ph et verticale pv sont diminuées pour les élancements faibles (de l’ordre de 0,8), et peuvent être réduits de moitié pour les silos élancés.
Note : les facteurs donnés ici sont des ordres de grandeur, obtenu avec les caractéristiques du blé, pour des silos d’élancement différents. D’autres matières peuvent donner des facteurs différents.
La rugosité dépend bien sûr de la nature de la paroi (acier noir/ inox/ béton/ …), mais dans le cas de tôles ondulées horizontalement ou des parois trapézoïdales, on considère que la matière dans les creux de la paroi reste immobile, et qu’il y a donc un certain pourcentage de la paroi où on obtient un frottement « matière sur matière » :
Cela se traduit par l’utilisation d’un coefficient de frottement effectif dans les calculs.
Une autre interaction qui est mentionné sans être détaillé dans l’Eurocode en version actuelle, est l’impact de la déformation de la paroi sous l’action de la matière ensilée, sur l’intensité de l’action, pour les silos rectangulaires. La déformation de la paroi est importante, et surtout variable, ce qui modifie les pressions de la matière. La nouvelle version de l’Eurocode (à venir) propose une répartition de la contrainte horizontale ph variable sur la paroi.
À noter que cette répartition n’est pas valable pour des silos à tirants.
Autres interactions sont possibles dans le cas d’un changement de la température :
- Refroidissement rapide et important de la température ambiante : la structure se rétracte autour d’une matière à température stable, donc inchangé en volume, ce qui crée des contraintes de traction dans la paroi
- Remplissage avec un matériau chaud, sur une couche de matière froide : la différence de température entre deux parties de silo peut créer des différences en déformation et donc des contraintes supplémentaires
Enfin, la présence de structure interne comme les tirants pose un problème particulier : afin de les dimensionner, on les considère chargés avec une action sur leur surface (vue en plan), dépendant notamment de la contrainte verticale pv au niveau où se trouve le tirant en question. La somme de cette action est alors transmise via les attaches sur les montants, puis traduit dans un effort normal vers les fondations. Pour autant, on ne peut pas envisager de diminuer pw et/ ou pv en-dessous de ce tirant, puisque la répartition réelle est impossible à évaluer. La conséquence est une surévaluation artificielle de la résultante globale, qui augmente avec le nombre de tirants.
Hannah Boehm, chef de projets au service études – CTICM