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Catégorie : Pratique et techniques de la CM
3 juin 2024

Dispositions constructives anti-fissuration pour les poutres mixtes calculées comme simplement appuyées

Il est possible de calculer une poutre mixte comme étant simplement appuyée, même quand la dalle est continue sur appui. Dans ce cas, des armatures longitudinales minimales sont nécessaires pour limiter la fissuration sur appui.

Introduction

Dans les cas les plus courants, il est d’usage de calculer une poutre mixte comme simplement appuyée même quand la dalle est continue sur les appuis. Les assemblages aux extrémités doivent alors être compatibles avec l’hypothèse d’un appui simple, c’est-à-dire qu’ils doivent autoriser une certaine rotation. Si la dalle est continue sur l’appui, la rotation dans les assemblages sous l’effet des charges se traduit par des contraintes de traction dans le béton, qui ne sont pas prises en compte dans les calculs. Pour limiter la fissuration sur appui sous ces effets secondaires, il est nécessaire de prévoir une quantité minimale d’armature longitudinale.

Cette simplification de la conception, qui consiste à négliger les effets secondaires de la continuité de la dalle, n’est permise que dans le cas des poutres de bâtiment.

Dispositions constructives relatives aux assemblages

Les assemblages aux extrémités d’une poutre mixte calculée comme étant simplement appuyée doivent être compatibles avec l’hypothèse d’articulation considérée dans le calcul. À cet effet, il est nécessaire d’adopter les dispositions constructives appropriées suivantes (Figure 1) :

  • il convient de prévoir un jeu suffisant entre les semelles de la poutre (principalement la semelle inférieure) et la semelle du poteau (dans le cas d’un assemblage poutre-poteau), de telle sorte que la rotation de la poutre par rapport au poteau ne soit pas bridée. En considérant une poutre uniformément chargée, sa rotation à une extrémité sera d’environ 16mrad lorsqu’elle est dimensionnée pour une flèche à l’état limite de service atteignant la limite communément admise de L/200. Cela équivaut à une rotation de 25 mrad aux états limites ultimes. Dans ce cas, la valeur minimale du jeu à prendre en compte peut être obtenue par la formule suivante :
  • où hc est la distance entre le plan moyen de la semelle inférieure et le centre de rotation de l’assemblage.
  • une dalle discontinue au droit du nœud est la disposition la plus appropriée permettant de ne pas brider l’articulation (Figure 1 b) ;
  • un continuité de la dalle reste toutefois compatible avec l’hypothèse d’une articulation (Figure 1 a). Il est alors nécessaire de prévoir des armatures longitudinales au droit du support pour compenser les effets du retrait et les moments secondaires négatifs dans la dalle, non pris en compte dans le calcul.

Le guide [4] de « conception des bâtiments multi-étagés à ossature métallique ou mixte » donne plus de détails sur ce type d’assemblages.

Figure 1 : Exemple d’assemblage articulé à l’extrémité d’une poutre mixte, avec ou sans continuité de la dalle

Dispositions constructives relatives aux armatures longitudinales

Dans le cas d’une poutre mixte calculée comme étant simplement appuyée, alors que la dalle est continue, la clause 7.4.1 (4) de la NF EN 1994-1-1 [1] indique la quantité minimale d’armatures longitudinales à disposer au droit des appuis afin de limiter la fissuration. Pour une construction non étayée en phase de construction, il convient que l’armature longitudinale ne soit pas inférieure à 0,2 % de l’aire de béton. Pour une construction étayée, cette limite inférieure passe à 0,4 % de l’aire de béton.

Une poutre mixte étayée en phase de construction requiert une quantité minimale d’armature plus importante car toutes les charges sont alors reprises en phase mixte.

Pour une dalle mixte, l’aire de béton est calculée en considérant la partie de la dalle située au-dessus des nervures du bac.

Les armatures longitudinales prévues par la clause doivent couvrir une longueur de 0,25 fois la portée de la poutre de part et d’autre de l’appui, sur une largeur égale à la largeur efficace de la dalle au droit de l’appui.

Il est à noter qu’en fonction du projet et de son environnement, des exigences supplémentaires sur le ferraillage peuvent être requises pour assurer une maîtrise de l’ouverture des fissures.

Exemple d’application

On considère la poutre dont le calcul complet est détaillé dans l’article [3] de la revue Construction Métallique, à savoir une solive mixte de L = 14 m de portée, dont l’entraxe avec les solives voisines vaut d = 3 m. La poutrelle est un profilé IPE 450 en acier S275. La dalle est mixte, avec une épaisseur totale td = 12 cm et avec un bac collaborant Cofraplus 60 dont les nervures sont orientées perpendiculairement à l’axe de la poutre (hauteur des nervures hp = 58 mm).

La poutre a été calculée en supposant qu’elle est simplement appuyée à ses extrémités. En admettant que la dalle soit continue sur appuis, et qu’aucune exigence de maîtrise de l’ouverture des fissures se soit imposée par le projet, il est nécessaire d’appliquer la clause 7.4.1 (4) de la NF EN 1994-1-1.

La poutre n’étant pas étayée en phase de construction, la quantité minimale d’armature à prévoir aux appuis est de 0,2% de l’aire de béton, ce qui donne l’aire suivante :

où :     As/s   est l’aire des armatures longitudinales par unité de longueur ;

tc est l’épaisseur de la dalle au-dessus des nervures du bac, obtenue par :

tc = tdhp

hp est la hauteur du bac.

Pour l’exemple, on a :

tc = 120 – 58 = 62 mm

As/s  ≥ 0,002 x 62 = 0,124 mm²/mm = 1,24 cm²/m

Un treillis ST25C, pour lequel As/s = 2,57 cm²/m suffit donc à assurer l’exigence minimale de ferraillage au droit des appuis.

Références

[1] NF EN 1994-1-1 : Eurocode 4 – Calcul des structures mixtes acier-béton – Partie 1-1 : Règles générales et règles pour les bâtiments. AFNOR. Juin 2005.

[2] Conception des bâtiments multi-étagés à ossature métallique ou mixte– P-O. Martin – CTICM 2024

[3] P-O. Martin – Calcul d’une poutre mixte sur appuis simples suivant l’EN 1994-1-1 – Revue Construction Métallique no 2018/2

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Pierre-Olivier Martin, directeur projets de recherche, CTICM

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